LE CAS
Dans une direction opérationnelle de 4.000 personnes (High Tech), il y avait un nouveau couple de dirigeants - président/directeur général qui ont la mission de faire évoluer les règles de fonctionnement de toute l'activité. Le cas est dans un cadre de changement d'envergure.
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Le nouveau DG entretient des relations avec les membres de son CODIR qui deviennent de plus en plus tendues :
- Le DG perçoit son CODIR comme hostile et peu collaboratif (la plupart des membres sont en mobilité ou déclarent y penser)
- Les membres CODIR perçoivent son DG comme quelqu’un de tatillon, autoritaire et peu expert : « il se focalise sur des détails », « il ne rentre pas dans les dossiers » , « il ne s’engage pas », « il refuse d’être aidé »
➔ de la méfiance de part et d'autre s’installe
Un jour, l’assistante du DG s’est plainte de harcèlement et le médecin du travail a partagé sa suspicion d'avoir affaire à un pervers narcissique et a exigé la mutation immédiate de l’assistante.
C’est une situation inquiétante du point de vue de la direction parce que il y a :
- une « victime » mise hors jeu
- certains managers le voient comme dangereux
- un doute pour le président et le DRH : Dr Jekyll ou Mr Hyde ?
Face aux allégations de harcèlement, la Direction a réagi :
- le Président a conseillé le DG d'être plus souple et l'a assuré de son soutien. Le Président reste solidaire avec le DG
- le Président a organisé une réunion auprès du CODIR pour recueillir les points de vue sur l’événement, et il préfère le faire sans la présence du DG
- le Président a soutenu l’idée d’une action de coaching pour son DG → ( c’est dans ce cas que la DRH a appelé LACT )
- le DRH a lancé une enquête interne menée par un coach interne
ANALYSE DE LA SITUATION
Le DG est convaincu de ne pas avoir le profil requis pour leader son CODIR et s’en défend : ll y a une auto-illusion dysfonctionnelle qu’il fait lui dire : « je ne suis pas à la hauteur ». Il ne supporte pas les signaux de rejet qui viendraient lui confirmer sa croyance de ne pas être à la hauteur.
Les tentatives de solution du DG :
- Il va se distraire de la peur, il va chercher de ne plus y penser
- il cherche surtout à se rassurer , en agissant avec l’intention d’obtenir des preuves de son autorité légitime.
En situation collective, il se trouve dans un état extrêmement tendu, il cherche à être efficace :
- il évite les débats en réunion sur les difficultés rencontrées
- par les membres du CODIR ; lui-même évite de parler de ses propres difficultés
- il se montre directif, il fait des propositions
Quand les membres du CODIR ne réagissent pas à ses propositions ou s’il ne peut pas éviter le sujet des difficultés qu’ils rencontrent, alors il se met en retrait et il dit : " ça me décourage, je laisse tomber ". Il y a une sensation de perte de contrôle qui réactive sa vulnérabilité.
Quand il n’est pas dans une situation collective, avec ceux qui ont fonction de lui porter assistance , il cherche à contrôler la situation jusqu’à devenir rigide et tatillon. Par exemple, avec son assistante (l’ancienne, la nouvelle), avec la coach interne, la RH : il se focalise sur des détails, il se justifie sur ses actes, il tente de faire adhérer à ses directives avec insistance, il se montre exigeant, directif, pointilleux, maniaque, avec urgence et instance.
Son insistance et ses justifications sont diversement perçues : comme une forme de fragilité ou comme les comportements d’un maniaque ou d'un pervers ; Son assistante, la coach interne, le président, le DRH ont essayé de le rassurer, ils lui ont dit qu’il peut avoir confiance. Plus il insiste, plus il y a une urgence à le satisfaire.
Les membres du CODIR se plaignent de leur DG entre eux et auprès de ceux qui les sollicitent à ce sujet et restent silencieux devant lui, notamment dans les réunions de CODIR. Les croyances individuelles et collectives que le DG n’est pas à la hauteur se cristallisent.
Les croyances de suspicion se rigidifient : oscillant sur l’hypothèse du pervers narcissique ou celle d’un imposteur. Elles sont partagées par les membres du CODIR et redoutées par le Président et le DRH.
On se retrouve dans un contexte où l’autorité est défaillante de la parte du DG et cette situation neutralise la coopération de son CODIR sur la transformation et fragilise la position du président.
INTERVENTION
1 - La diagnostic
On commence avec une diagnostic opératoire auprès du système pertinent : le président – le directeur général – le DRH - le coach interne avec une restitution qui était « réunion de travail » pour identifier « le problème et l’ objectif » du président par rapport à cette situation.
La diagnostic opératoire c’était de présenter finalement la situation d’un chef qu’était désarmé face à une équipe qui le sollicite sur un terrain d’expertise qui n’est pas le sien. Il sait que le président pense que cette expertise n’est pas nécessaire, mais se sent fragilisé de ne pas l’avoir.
2 - La stratégie d’intervention
Les prescriptions spécifiques étaient orientées pour lui faire expérimenter une autre réalité :
- Affronter la relation collective plutôt que de l’éviter (surtout par rapport à son CODIR)
- Observer tous les signaux qui viennent lui confirmer le danger
- Observer ses collaborateurs comme des gens différents avec des besoins différents des siens
- L’arme secrète : mettre de la bienveillance (donner un espace à ses collaborateurs pour pouvoir mieux entendre ce dont ils ont besoin)
En affrontant la relation collective avec son équipe et en prenant le risque de montrer sa fragilité (pas de solution immédiate à l’expression des inquiétudes de ses collaborateurs), il découvre une nouvelle façon d’exercer son influence :
- Cela soulage ses collaborateurs, qui vont se dire qu’il s’intéresse plus à eux
- Sans solution immédiate, il favorise la recherche de solution par eux-mêmes
- Cela fait émerger une nouvelle croyance : « C’est puissant » = « je suis à la hauteur… »